Au cours de mon parcours professionnel, je me suis à de très nombreuses reprises reproché de n’être excellent dans aucun domaine, de n’avoir aucun secteur de prédilection dans lequel j’étais indéniablement doué. Je m’intéressais à plein de choses différentes qui, parfois, se croisaient pour résoudre un problème ou l’autre. Mais jamais je n’ai su pour quoi j’étais vraiment fait. Il s’avère qu’un terme existe pour cela : multipotentialités.
Vivre dans un monde de spécialistes
De toute évidence, nous sommes en grande partie définis en tant que personne par le métier que nous exerçons. Souvent, la deuxième question après « comment est-ce que tu t’appelles ? » est, dans la grande majorité des cas, « tu fais quoi dans la vie ?« . C’est un fait. Que l’on soit d’accord ou pas n’est pas la question. Il me semble juste important de noter au passage qu’il existe comme une sorte d’injonction sociale qui nous pousse à être excellent dans un domaine, de devenir un spécialiste ou de n’être personne.
Dans mon cas, c’est clairement ce qui s’est passé. À la fin de mes études de communication, je rêvais de travailler dans une grande agence de publicité. Alors j’ai envoyé des candidatures, des tonnes et des tonnes de candidatures qui sont restées sans réponses. Lorsque j’avais une réponse et que j’expliquais, de manière candide, que j’avais un parcours particulier, que j’avais commencé par un BEP d’électrotechnique et que j’avais terminé par une licence en communication, les portes se fermaient systématiquement. Cela a longtemps été une grande source de frustrations, de souffrances et de remises en question. Dans le même temps, ça m’a poussé à toujours chercher à approfondir mes connaissances et compétences… dans un domaine en particulier à la fois, sans pour autant que jamais je ne parvienne à m’arrêter sur un domaine en particulier.
Heureusement, j’ai eu la chance de croiser la route de personnes ouvertes et qui m’ont fait confiance et m’ont donné une chance de faire mes preuves. Et lorsque je repense à ces situations de désespoir, je me dis qu’au final, c’est exactement ce qui devait se passer. La mère de mon meilleur ami nous a souvent répété qu’il ne fallait « jamais blâmer une contrariété« . Elle a raison ! Aujourd’hui, j’ai pris du recul sur cette situation et j’ai même tendance à croire que ce sont ces capacités à me passionner, à apprendre ne serait-ce qu’en substance de nombreuses choses, qui sont ma plus grande force.
« Je pensais que j’allais devoir choisir une seule chose, renier toutes mes autres passions et me résigner à m’ennuyer. »
Emilie Wapnick
Multipotentialités selon Emilie Wapnick
Sur son site Internet, Emilie Wapnick définit cette particularité de raisonnement par « multipotentialités ». Un terme dont j’imagine qu’elle est à l’origine et qui reflète parfaitement la situation. Selon elle, le fait d’avoir cette disposition favorise plusieurs choses, à savoir :
- La combinaison des idées entre elles, de penser en arborescence
- Le fait d’apprendre rapidement, d’autant plus que des compétences sont transmissibles d’un domaine à l’autre
- La capacité d’adaptation, de se transformer en ce que l’on a besoin d’être à un moment donné
Dans la conférence qui va suivre, elle confirme ce que je vous disais un peu plus haut. Et effet, elle mets également l’accent sur le fait que les multipotentialistes sont voués à devenir comme les autres, ou en tout cas à tout faire pour le devenir, sous l’influence de la société pour laquelle les spécialistes sont mieux vus.
Comme elle le précise cependant, il ne s’agit évidemment pas de prétendre que les multipotentialistes sont mieux ou pires que les spécialistes, ils ont juste une manière de pensée différente. Ce qu’il faut retenir de tout ça, c’est que les meilleures équipes sont celles qui associent les spécialistes aux personnes disposant de multipotentialités.
Quoi qu’il en soit, si vous vous sentez dans cette situation, si vous sentez que vous vous bridez ou qu’au contraire en ne vous bridant pas vous n’arrivez pas à vous définir et à trouver votre place dans la société… cessez de vous tourmenter. Vraiment, c’est une incroyable chance que nous avons d’être capable de tant d’adaptabilité, d’apprendre tant de choses. Plutôt que de nous brider, profitons en pour les partager autant que nous le pouvons, pour nous en servir pour résoudre toutes sortes de problématiques et enfin, arrêtons d’être si durs avec nous mêmes.
Nous ne sommes pas des spécialistes, et alors ?
Amitiés,
Romain
—
Photo by Christopher Sardegna on Unsplash